« Je refuse de m’identifier à mes faits et gestes quotidiens » Cette phrase est de l’auteur de Bonjour Monsieur Courtot ! (Éditions Ellébore, 1984, dirigées par Jean-Marc Debenedetti). Les circonstances qui conduisent à sa disparition le 5 août 2018 relèvent très exactement de ce quotidien dont l’ensemble de son oeuvre, de livre en livre, s’extrait de toutes ses forces par une inflexible résolution de l’imagination. Claude Courtot ne craignait pas le mot « oeuvre », par quoi il faut surtout entendre, en l’occurrence, la construction patiente et insistante d’un ensemble de relations inaperçues entre des événements, des éléments culturels et des émotions, échappant à la lassante répétition des formules apprises par coeur auprès des mentors majuscules, comme à l’infidélité oublieuse de ce qui éternellement (dirait Ferdinand Alquié et quelques autres) récuse ici et maintenant la volatilité généralisée.
Après l’expérience surréaliste entre 1964 et 1969 (sous le double signe de Benjamin Péret et de René Crevel auxquels il consacre des études saluées par André Breton) succéda une longue période de silence d’à peu près dix années : ce temps de latence lui a été nécessaire pour reprendre voix, individuellement, sans pour autant se croire investi d’un rôle qui n’était pas à sa mesure, compte tenu du dérèglement général de l’horloge sociale et du retour à l’ordre des années 80. Le premier ensemble de récits, publié en 1971 sous le titre Carrefour des errances (Éric Losfeld, « Le Désordre »), indiquait déjà certaines de ses inclinations les plus profondes qui se déploieront plus tard. […]
Extrait de l’article de Jérôme Duwa dans Infosurr n° 143.